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L’agriculture au moyen-age dans le Graisivaudan

Les exploitations agricoles

vendredi 27 août 2004, par Mireille

Les exploitations agricoles sont la base de l’économie médiévale : c’est autour de ces fermes que les paysans se sont regroupés, constituant ainsi un hameau qui deviendra par la suite une paroisse.

Moyennant certaines redevances, les paysans exploitent la terre des le XIe siècle dans le Graisivaudan. Elles appartiennent selon le cas au seigneur laïc ou à des ecclésiastiques comme les monastères ou l’évêché de Grenoble et sont tenues en fief par des petits nobles comme les Granges ou les Chateauneuf à La Buissière. Les paysans sont des hommes libres et le servage ne semble pas avoir existé, le terme " servus " ne figurant jamais dans les textes.

On distingue trois types d’exploitation rurale par ordre décroissant de taille : le mas, la cabannerie et la borderie.

LE MAS comprenait une ou plusieurs habitations pour les tenanciers des prés et des champs labourables. Selon les lieux, il avait ses noyers et ses vignes. On y élevait du bétail, surtout des porcs et des brebis. Pour assurer l’élevage du bétail, des terres incultes étaient associées au mas que le tenancier pouvait défricher à son gré, des alpages et des bois. Les mas avaient le plus souvent des limites naturelles. Leurs tailles étaient variables : de 40 à 137 sétérées.

LES CABANNERIES ET LES BORDERIES étaient moins étendues et moins chargées que les mas. On constate le plus souvent qu’un mas valait deux cabanneries et quatre borderies.

LES CEREALES

Le sol du Graisivaudan était riche, propice aux céréales et surtout la vigne sur la rive droite . Dès le XIe etXIIe siècles on trouve des traces de cultures de céréales en Graisivaudan : le froment est cultivé au début du XIIe siècle sur le plateau des Petites Roches.

Les propriétés étaient très morcelées car les actes de ventes fourmillent de lots minuscules. Les tenues étaient assez stables pour que le paysan s’imagine propriétaire. La charte de franchises de La Buissière indique que les héritages se transmettaient de père en fils sans droit de succession.

Le froment était une des bases de l’économie de la région. Sa valeur était supérieure aux autres denrées (quatre fois plus que l’orge et six fois et demie plus que l’avoine en 1364). Sa culture était aussi pratiquée sur le Plateau des Petites Roches à cette époque.

L’orge est assez rare si on en juge par les redevances : il est signalé seulement à Bellecombe en 1393. Le seigle ne parait pas dans les textes des XIV et XVe siècles mais cela ne veut pas dire qu’il n’existait pas dans le pays. Il faut en effet tenir compte de l’indécision qui régnait dans les appellations de céréales et certains comptes de chancellerie nous en avertissent, on convertissait souvent une redevance en d’autres probablement pour simplifier les calculs. A la Buissière et Bellecombe les fèves étaient comptées avec le froment et les noix avec l’avoine. Les châtaignes étaient comptées avec le froment ou l’avoine. Froment et avoine étaient particulièrement abondants surtout sur le plateau des Petites Roches où ils étaient la ressource essentielle des habitants de St Hilaire, St Pancrasse et St Bernard ainsi qu’à La Buissière.

L’orge et le seigle, surtout ce dernier, étaient des cultures négligées. L’avoine était fort répandue. Elle était cultivée partout, même sur le Plateau des Petites Roches. Cette culture était surtout destinée à l’alimentation des chevaux

LA VIGNE

C’est la vigne qui différenciait plus le mandement de La Buissière de ceux d’Avalon, Allevard, Theys ou Moretel si pauvres à cet égard. La vigne trouve sur les coteaux ce qu’il lui faut : sol pierreux et chaud, à l’abri des vents près de la montagne, bien exposé. La vigne fournissait à la châtellenie sa récolte la plus abondante.

La vigne était cultivée sur les côteaux du Graisivaudan depuis le milieu du XIe siècle. Comme le froment, la vigne poussait partout. A La Buissière en 1393, 157 personnes payent une redevance en vin. Quelques unes d’entre elles donnaient une sommée entière, d’autres une fraction de sommée ce qui faisait en tout 77 settiers 3 quartaux.

A partir du XIVe siècle on voit la vigne régner en maîtresse sur la rive droite du Graisivaudan, surtout de Grenoble à Lumbin et le pays présentait l’aspect d’un immense vignoble. Cette adaptation était facilitée par la proximité de Grenoble, ville de passage et de gros marché. Il se vendait aussi sur place dans les auberges de la vallées où on en consommait des quantités importantes.

Dès le XIVe siècle, les bourgeois de Grenoble, enrichis par leur industrie et leur commerce, les artisans aisés envahissent la rive droite où ils voulurent avoir une maison de campagne, des terres et surtout des vignes.

Les procédés employés pour la culture de la vigne, étaient à peu près les mêmes que ceux d’aujourd’hui :
Sur les pentes où le labour était impossible, on fouillait le sol à la main (fodere)
On taillait la vigne (putare)
On retournait une deuxième fois la terre (binare)
Et pour la production, on pratiquait le provignage (provignare)

Les ceps étaient soutenus par des pieux, les sarments attachés à des échalas qui élevant le raisin au dessus du sol lui permettait de recevoir plus de soleil. Cette culture en raison même des soins nécessaires était très coûteuse. Une partie du travail était assurée par endroit par la corvées (les corvéables étaient nourris, ils recevaient du pain du vin et du fromage)

LES AUTRES CULTURES

On rencontrait de nombreux noyers à Barraux ; le chanvre était cultivé un peu partout sur la rive droite dont St Marie d’Alloix et Bellecombe, mais il était surtout concentré dans le mandement de Montbonnot.

L’apiculture se pratiquait sur le Plateau des Petites Roches, peut-être grâce à la proximité des forêts de sapins. Les arbres fruitiers et la ciboulette sont mentionnés dans les comptes de châtellenie sans plus, preuve d’une importance marginale dans l’économie du mandement. De même le chanvre n’est pratiquement pas cité et plus mentionné à partir du milieu du XIVesiècle. Cette culture était surtout pratiquée au sud de Montbonnot et à St Ismier.

En fait l’agriculture de cette époque était très similaire à celle qui était encore pratiquée au début du siècle.

L’ELEVAGE

Plus encore que l’agriculture le mandement était favorisé pour l’élevage. Volaille et bétail étaient abondants et variés.

La volaille

C’était une ressource supplémentaire et un luxe car lorsque le Dauphin passait à la Buissière on lui servait régulièrement des poules et des poulets. La charte de franchise prévoit que le châtelain ne peut prendre de force des poules chez l’habitant pour les offrir au Dauphin sans les payer le jour même. Pourtant la volaille était secondaire à côté du bétail.

Les porcs

Les porcs constituaient la richesse la plus originale du mandement grâce à la belle futaie de chênes de la forêt de Servette et aux glands qui s’y trouvaient. On entretenait les porcs à l’étable pendant une partie de l’année puis on les menait à la forêt au moment des glands pour les engraisser. De 1353 à 1356 les guerres entraînent un manque de glands. Cet élevage périclita avec la fin de la forêt de Servette. Leur nombre était de 200 en 1383, 220 en 1387,187 en 1407 112 en 1409. Le Dauphin, qui était propriétaire de cette forêt exigeait en redevance toutes les oreilles de porc. Le Dauphin percevait un droit de paissonage de 4 deniers pour les porcs conduits dans la forêt de Servette pour l’engraissement, 2 deniers seulement pour les porcs nourrains et les truies.

Les bovins

L’élevage bovin était important dans la plaine. Plus que pour le lait, les vaches étaient utilisées comme bêtes de somme pour le labourage ou pour tirer de lourds chargements. Les bovins étaient également utilisés en boucherie. Le Plateau des Petites Roches étaient spécialisé dans l’élevage. Le bétail était mené au pâturage de l’Alpe à partir du mois de mai. L’été, une bonne partie du bétail était montée à l’Alpe pour pouvoir moissonner le foin et le rentrer dans les granges. Des vols réciproques du bétail avec les savoyards d’Entremont sont souvent mentionnés dans les documents. Curieusement, ceci ne s’appliquait pas aux vaches appartenant en propre au Dauphin, le jeu étant trop dangereux !

Pour obtenir l’engrais nécessaire aux cultures épuisantes comme le froment ou le chanvre, la population de la rive droite élevait du bétail. A la fin du XIIIe siècle le Dauphin percevait chaque année dans le mandement de La Buissière, 80 charges de foin estimées 40 sous. On ne sait pas si ce foin était dû par ceux qui possédaient des bœufs. Le nombre de bêtes avoisinait 80 sur l’Alpe, les autres restaient en bas à l’étable comme bêtes de somme.

Dans les alpages, s’étendant de Ste Marie du Mont à Bellecombe on voyait paître toutes sortes de bestiaux : bœufs, vaches, chevaux et surtout des moutons.

Les moutons

Moutons et brebis étaient les plus nombreux comme le montre l’importance des redevances en nature perçues par le Dauphin en fromage de brebis. Ces troupeaux ne passaient pas l’hiver sur le mandement mais transhumaient depuis le Viennois.